À Cambrai, deux classes de quatrième ont travaillé sur un projet solidaire et écologique autour des règles. Objectif : lutter durablement contre la précarité menstruelle et libérer la parole des filles… et des garçons.
Au lendemain de la journée internationale des droits de la femme, Glwadys, Marine, Garance et Hylann sont volontairement arrivés de bonne heure au collège pour remplir une mission qui leur tenait à cœur : distribuer à chaque jeune fille du collège une pochette avec des protections hygiéniques.
Les protections sont bio pour ne pas avoir de produits toxiques. Dans la pochette, iI y a une serviette pour le jour et une pour la nuit ou les flux abondants
, explique Glwadys à son auditoire.
Le contenu a été adapté en fonction de l’âge des destinataires : la pochette réalisée par l’ARPE, une association d’insertion locale, contient deux serviettes pour les 6ème et les 5ème, alors que les 4ème et les 3ème reçoivent en plus trois tampons avec et sans applicateur.
Les pochettes ont été financées par une autre association cambrésienne, Culture et Mémoire, qui monte toute sorte de projets en faveur des adolescents.
Le conditionnement a été réalisé par une vingtaine d’élèves de quatrième, dont sept garçons volontaires. Hylann est l’un d’eux, il a tenu à participer pour rendre service
et alors que certains de ses camarades sont visiblement encore très mal à l’aise sur le sujet, il déclare calmement :
Les règles, c’est pas tabou : c’est naturel et il faut en parler !
Prochainement, toutes les filles recevront aussi une serviette lavable en coton biologique, faite en France, afin de les inciter à aller vers le zéro déchet. Et parce que la précarité menstruelle est un véritable problème au sein du collège, un distributeur de protections hygiéniques gratuites sera installé dans l’établissement.
Intégrer les garçons dans un projet porteur de sens
Porté par Murielle Vallet, professeure de mathématiques et référente égalité filles-garçons au sein de l’établissement, le projet est né suite à l’allocation d’un budget par le rectorat à un certain nombre de collèges classés en REP pour travailler sur la précarité menstruelle.
Au collège Lamartine, nous avons tenu à étendre la réflexion en construisant un projet global qui ait du sens, qui s’inscrive à la fois dans les apprentissages et dans la durée. Et nous avons tenu à y inclure les garçons
, explique-t-elle.
Pour ce qui est des apprentissages, Murielle Vallet a pu compter sur sa collègue Corine Soudant, professeure de Sciences de la Vie de la Terre qui traite le sujet dans le cadre du programme de 4ème.
Mais elle a également réussi à mobiliser sept collègues hommes de tous âges qui ont accepté de témoigner auprès des jeunes sur le regard qu’ils portaient sur ces questions alors qu’ils étaient, eux aussi, des ados. Intégrer les hommes au projet a permis d’intégrer les garçons et de débloquer la parole. Les garçons ont pu se mettre à la place des filles et vice-versa.
Fadila Chanane, infirmière au collège, constate au quotidien que le sujet est encore largement tabou : certaines filles chuchotent quand elles viennent me demander une serviette hygiénique ou n’osent même pas me dire qu’elles ont leurs règles…
En donnant l’occasion aux jeunes de mettre des mots sur des interrogations, le projet a permis de lutter contre le manque d’information à l’origine des moqueries. Alors elle est confiante et conclut : Le chemin est encore long mais on avance !
Crédits photo : Ph. Houzé